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Discours de réception à l’Académie

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M. Alain FINKIELKRAUT, ayant été élu à l’Académie française à la place laissée vacante par la mort de M. Félicien MARCEAU, y est venu prendre séance le jeudi 28 janvier 2016, et a prononcé le discours suivant :

Mesdames, Messieurs de l’Académie,

En manière de préface au récit débridé que lui a inspiré le tableau d’Henri Rousseau La Carriole du père Juniet, Félicien Marceau relate le dialogue suivant :

– La carriole du père Bztornski ? dit le directeur de la galerie. Qu’est-ce que ça veut dire ?

– C’est le titre de mon tableau, rétorqua le douanier Rousseau.

Le directeur plissa son nez, qu’il avait fort grand, et agita son index, qu’il avait fort long.

– Mon pauvre ami, avec ce titre-là, vous ne le vendrez jamais, votre tableau.

– Tiens ! Pourquoi ? dit Rousseau qui, de son passage dans l’administration de l’octroi, avait gardé le goût d’aller au fond des choses.

– Bztornski ! reprit le directeur avec force. C’est un nom à éternuer, ça. Mon cher monsieur, retenez bien ceci : un client qui éternue, c’est un client qui n’achète pas. Continuer la lecture de Discours de réception à l’Académie

“Si j’étais de droite, je le dirais.”

Finkielkraut, Le Monde

Le Monde, 16 Janvier 2016, Propos recueillis par Nicolas Truon.

Ecrivain et philosophe, Alain Finkielkraut est l’auteur chez Stock de L’Identité malheureuse (2013) et de La Seule Exactitude (2015) et anime depuis trente ans l’émission hebdomadaire « Répliques » sur France Culture. Il revient sur le reproche qu’on lui fait d’être un néoréactionnaire et sur le climat intellectuel qui règne en France depuis les tueries du 13 novembre 2015.

Vous reconnaissez-vous dans la catégorie des néoréactionnaires ?

Je suis régulièrement traité de réactionnaire, je suis sur toutes les listes noires qui apparaissent périodiquement, tels des marronniers, dans la presse, depuis Le Rappel à l’ordre de Daniel Lindenberg. Si j’étais de droite, je le dirais. Mais je pense que ce clivage a perdu toute pertinence et je me reconnais davantage dans cette phrase d’Albert Camus : « Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas. Mais sa tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde se défasse. » Et bien je voudrais empêcher, par exemple, que l’école se défasse. Or tous les partis ont une responsabilité dans cette déliquescence. Il faudrait donc redéfinir les catégories politiques. Je précise que je n’aurais aucune honte à me dire de droite, mais la droite et la gauche épousent le même mouvement de l’extension illimitée des droits dans lequel je ne me reconnais pas. Continuer la lecture de “Si j’étais de droite, je le dirais.”