Alain Finkielkraut – Natacha Polony – Polonium, Paris Première, 13 novembre 2015
- “Mon effort, est un effort philosophique, parce que j’essaye de diagnostiquer le présent. Le présent, en tant qu’il ne s’est jamais présenté, en tant qu’il est différent de ce qui est autre que lui-même, c’est à dire le passé.”
- “Je suis absolument d’accord avec vous, la nation doit être une unité englobante, et cela veut dire bien entendu que “l’autre” n’est pas simplement à respecter, il est aussi et surtout à intégrer. L’assimilation, pour moi, ce n’était pas l’obligation qui m’était faite en tant que Juif de sacrifier ma différence, c’était la possibilité qui m’était donnée d’assimiler cette culture française, et après tout, cette possibilité aujourd’hui est refusée aux français de fraîche date, comme au français de souche, puisque cette culture française n’est plus au programme de personne. La France était un vieux monde dans lequel on introduisait tous les nouveaux venus que sont les enfants, et maintenant, de ce vieux monde on veut en quelque sorte se débarrasser, on liquide l’héritage pour mettre tout le monde à égalité.”
- “J’ai le goût de l’analyse. Je pense que pour empêcher le désastre, il faut faire face au désastre. (…) Je suis absolument convaincu que beaucoup de gens veulent une école exigeante et que si des familles soustraient aujourd’hui leurs enfants à l’école publique, c’est pour précisément trouver la rigueur de l’école républicaine ailleurs qu’à l’école publique parce qu’ils ne l’y trouvent plus. Je plaide pour cette lucidité de la part des politiques, tout n’est pas perdu sauf si on continue de fermer les yeux sur le désastre.”
- “On pouvait parler de progrès tant qu’on se plaçait dans la perspective d’un temps prometteur. Aujourd’hui l’avenir n’est pas prometteur, il est menaçant. Et plus il est menaçant, moins on a le droit de regarder en arrière, la nostalgie est criminalisée, et je ne plaide pas pour un retour en arrière, mais je m’étonne, si vous voulez, de voir ces progressistes devenir si hargneux depuis que tout le monde est veuf de l’idée même de progrès.”
- “Cette immédiateté technologique, qui ne laisse même pas de place au deuil et à ce que le deuil a d’intime et de privé. On est vraiment dans l’univers de Facebook où tout s’affiche tout de suite, où même la souffrance devient un moment d’exhibition.”