Invité d’Audrey Crespo-Mara sur LCI, le philosophe – académicien, qui publie « La seule exactitude », juge le raisonnement de Michel Onfray sur l’Islamisme « extravagant ». – 23 novembre 2015
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Puisque vous évoquez Molenbeek, diriez-vous comme Éric Zemmour qu’« au lieu de bombarder Raqqa, la France devrait bombarder Molenbeek » ?
Non. D’abord, il ne faut pas prendre au pied de la lettre ce qu’a dit Éric Zemmour, c’était une expression, ce n’était pas une injonction. Mais, je n’aurais pas dit les choses de la même manière. Surtout, je pense qu’il est indispensable aussi de bombarder Raqqa ! Nous avons été attaqués par des terroristes qui, à la différence d’Al-Qaïda, ont aujourd’hui une adresse. Le califat n’est plus un rêve, c’est un lieu. On ne peut pas laisser des attaques aussi violentes sans réponse, ça aurait un effet absolument déplorable. Simplement, on ne règlera pas, en bombardant Raqqa, les problèmes posés par Molenbeek et d’autres lieux de plus en plus islamistes en Europe et notamment en France.
Dans votre livre, vous intitulez le chapitre consacré aux attentats de Copenhague de février 2015, « Le tragique de répétition ». Et, vous espérez qu’aujourd’hui un « sursaut national » permettra à la France de vaincre l’État islamique. De quelle nature doit être ce sursaut national ?
Il va être très difficile de battre l’État islamique sur le terrain. Parce que, d’abord, il a des soutiens. Il y a une alliance objective entre les tenants sunnites d’un islamisme radical qui englobent le Qatar, l’Arabie saoudite, les Frères musulmans, et la Turquie d’Erdogan qui n’est plus du tout un islamiste modéré. Comment vaincre cette alliance ? Ça va être extraordinairement difficile. Et la deuxième difficulté est qu’il y a un problème en Europe. Ce qu’on doit toujours souhaiter, c’est une intégration des musulmans de France, et on assiste à une islamisation d’un nombre grandissant de quartiers. C’est une lutte de très longue haleine qui doit être menée.
« Il faut reprendre les territoires qui, sur notre sol, sont déjà entrés en sécession culturelle », dîtes-vous. Comment lutter contre ces supposées sécessions ?
Je pense qu’il faut être très ferme, qu’il faut être intransigeant. Je suis frappé d’une chose pour ce qui est de ces attentats. On a attaqué des cafés. « Je suis en terrasse », très beau slogan ! Il veut dire quelque chose. Le café, c’est une des plus belles réalisations de la civilisation européenne. Les cafés et leur mixité. Des lieux de civilité particulièrement prisés en Europe. Or, vous avez des villes aujourd’hui où les cafés ne sont peuplés que d’hommes parce que précisément leur population a changé. Autrement dit, les terroristes s’attaquent à nos mœurs. Nos mœurs, nous ne pouvons pas vouloir les exporter sur la terre entière, ça, ce n’est plus possible, mais nous pouvons vouloir qu’elles s’imposent sur notre territoire. Et ça nous devons le vouloir sans rien céder.
Qu’est-ce qui, dans cette époque, vous rend heureux ?
Mes amis, mon épouse, voilà, c’est ça qui me rend heureux… Les bons repas avec mes amis, des livres que je peux lire, des spectacles que je peux aller voir, des films, une vie culturelle qui est quand même assez intense. Je ne suis pas un homme malheureux ! Je suis un homme inquiet… comme tout le monde. Mais je ne suis pas malheureux. J’ai beaucoup de chance dans ma vie. Beaucoup de chance, en réalité…